LFB, l'adieu à Laloubère avec Marie-Laure LAFARGUE (Basket Landes) : "L'âme de Basket Landes déménage avec nous"



Le 30 avril 2008 à Valenciennes, le BLMA a éliminé la grande USVO en demi-finale du Championnat de France (83-59 puis 68-66). Ce soir-là, les nordistes ont disputé le dernier match de leur histoire avant de disparaître 15 jours plus tard sous la forme d'une fusion avec Saint-Amand. J'y étais - Alain S. je suis certain que tu t'en souviens aussi - et je n'ai pas oublié les larmes des supporters nordistes à l'issue de la rencontre...
Près de 7 ans plus tard, ce mercredi 1er avril - et ça n'est pas un Poisson d'avril - c'est une autre page de l'histoire du basket féminin français qui se tournera peu avant 22 heures : au moment où retentira le buzzer final, Basket Landes aura alors disputé sa dernière rencontre dans sa mythique salle de Laloubère, à Saint-Sever. Pour vous dire, L'EQUIPE a même consacré une demi-page à cet évènement dans son édition de jeudi dernier 26 mars. Bien entendu, le résultat de cette rencontre face à Charleville aura son importance (les landaises sont au coude-à-coude avec l'inattendu outsider angevin) mais même si la victoire est là, nul doute que quelques larmes rouleront la aussi sur les joues des habitués. Dernier tour d'horizon avec Marie-Laure LAFARGUE, la directrice financière de Basket Landes, l'occasion de tourner quelques pages anciennes avant d'en écrire de nouvelles...

• Marie-Laure, tout d’abord comment vas-tu à l’approche de cette journée particulière ?
Bonjour Dominique ! Lundi matin, je vais surtout bien après un weekend qui nous a permis de conforter notre quatrième place pour boucler une semaine qui était rude sur le plan physique pour tout le monde sur et autour du terrain avec l’accueil de Bourges la semaine dernière.

• Dans quel état d’esprit es-tu ?
Concentrée ! Dernière semaine de phase régulière. Un enjeu sportif et stratégique majeur pour le club avec le défi d’une seconde demi-finale. Pour l’instant, pas de place pour la nostalgie. De la logistique, de la communication, de la billetterie ! Au boulot pour tout le monde quoi !

• Tu n’en as pas assez de parler de cette « dernière » à Laloubère ?
Pour tout te dire on va surtout en parler ces 48 prochaines heures. Le rythme des événements récents nous a permis de ne pas trop monter en pression sur le sujet avant la semaine dernière. Quant à parler de Laloubère c’est plutôt un plaisir. Ça fait partie de notre histoire. J’ai grandi du côté d’Eyres Moncube donc c’est plutôt un plaisir même si mercredi la soirée sera sans doute très nostalgique pour moi et ceux qui accompagnent l’aventure depuis longtemps… mon père longtemps président d’Eyres Moncube, ma mère, bénévole de la première heure, Dominique LAFARGUE et tous ceux qui font les piliers de cette maison familiale depuis si longtemps...

• Revenons quelques années en arrière. Peux-tu nous rappeler rapidement comment Basket Landes est arrivé ici à Saint-Sever, en 2006 je crois ?
Basket Landes est arrivé en 2006 effectivement au moment de la montée en NF1 à l’époque (Ligue 2 aujourd’hui) à un moment où déjà notre cathédrale d’Eyres Moncube ne respectait pas les cahiers des charges réglementaires. La volonté de la municipalité de Saint-Sever et de la communauté de communes a à cette époque facilité l’accès à la salle Laloubère, équipée d’un parquet et de tribunes en deux temps trois mouvements pour accompagner notre accession arrivée plus tôt que prévue. C’est cette année-là aussi que nous a rejoint Anaïs LE GLUHER.

• Quelle est la première rencontre qui s’y soit disputée ?
C’est une colle. Ma mémoire me fait défaut !!!

• Qu’y avait-il avant dans cette salle ?
Il y avait et il y a toujours d’ailleurs comme en atteste la multitude de tracés sur le parquet : un autre club de basket évoluant en championnat régional, un club de volley, un club de tennis, 5 établissements scolaires, des manifestations politiques, des spectacles de danse, quelques spectacles… Laloubère est la seule salle de cette taille dans le territoire et est une salle polyvalente !

• Quel est ton meilleur souvenir à Laloubère sur le plan sportif ?
C’est une question qui m’est beaucoup posée ces derniers jours et il est difficile d’y répondre … Ça va peut être te paraître bizarre mais ils ne sont pas récents… Le premier date de l’époque d’Eyres Moncube où en 1989 on avait délocalisé à Saint-Sever un ¼ de finale de Coupe de France face à Poitiers… perdu mais qui me laisse un souvenir d’une immense bringue … les Filles d’Eyres étaient des héroïnes à l’époque ! Plus récemment parce que j’y associe un événement basket et une grosse fête aussi (c’est souvent le cas dans le coin)… le dernier match de la saison 2006-2007. On reçoit Reims qui vient gagner son accession en LFB chez nous mais on célèbre surtout le jubilé de notre capitaine historique Mapie DUHAU qui passe la main après avoir assuré la transition Eyres Moncube vers Basket Landes. Le tout se finira dans une longue nuit de fête avec les joueuses de Reims à la Muleta à Saint-Sever.

• Qu’est-ce qui caractérise le mieux selon toi la particularité de cette salle ?
Si je m’en tiens à la réglementation, je dirais en riant… son illégalité !!! Mais plus sérieusement et fièrement surtout une ambiance qui nous colle à la peau. Celle d’une culture locale festive et conviviale, d’une proximité avec les joueuses, de l’idée que même petits on peut soulever des montagnes à force de solidarité et de courage. Nous sommes un territoire rural et très sportif où ces valeurs sont porteuses de sens et je pense que notre public et notre salle transpirent cette culture.

• On a souvent dit que Laloubère, c’était 10 points pour Basket Landes avant même le début de la rencontre. Tu confirmes ?
Non je ne confirme pas parce que ça enlèverait du mérite et du talent à notre équipe et je crois qu’on n’a plus à prouver que sportivement nous devons nos résultats à autre chose. Après, à n’en pas douter, Laloubère est une salle comme on en voit peu. En premier lieu parce qu’elle est pleine (ce qui n’est pas si fréquent en LFB) et ensuite, je ne le sous-estime pas, parce que cette proximité, ce bruit ne sont pas anodins. Maintenant je ne crois pas que nous soyons la salle coupe-gorge que certains ont parfois voulu décrire…

photo : Mairie de Saint-Sever
• Essayons de mettre maintenant la partie affect de côté. Laloubère c’est aussi des conditions d’accueil très moyennes quand il y a forte affluence et des conditions de sécurité parfois limites y compris pour les joueuses. Etait-il envisageable de rester ici pour un club qui veut continuer à grandir ?
Bien sûr que non nous ne pouvions pas continuer ainsi. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons travaillé avec acharnement au projet de création d’une nouvelle salle. Il y aurait de toute manière eu une fin de l’histoire à Laloubère. Il est nécessaire, pour la poursuite du développement du club de disposer d’un outil de travail conforme au modèle économique du haut niveau que nous souhaitons développer : une base stable de subventions et le développement de recettes de billetterie et de partenariat.

• Trois projets ont été envisagés : l’agrandissement de la salle actuelle, la construction d’une nouvelle salle toujours à Saint-Sever et l’Espace Mitterand à Mont-de-Marsan, choix finalement retenu. Sportivement parlant, économiquement parlant, la solution retenue n’est-elle pas la plus raisonnable d’autant que le Centre de Formation est lui aussi à Mont-de-Marsan ?
C’est un débat politique et économique qui a été tranché. L’agrandissement de la salle actuelle était exclu depuis longtemps. Direction Mont-de-Marsan, c’est acté.

• Si tu avais été seule à pouvoir décider, quel aurait été ton choix ?
Le projet du club est un projet territorial de développement. La position du club et de son conseil d’administration a été clairement exprimée en temps voulu. Elle est la mienne aussi. Le débat politique n’est pas le notre. Priorité au club !

• Une pétition en ligne, une page Facebook, une annonce symbolique dans le Bon Coin, vous n’avez pourtant pas lésiné sur la communication pour faire reculer le projet ! Pétition, page facebook.

Oui on a observé ça mais ce n’était pas des initiatives du club. Simplement le témoignage je pense de supporters qui ont eu besoin d’exprimer leur avis. C’était plutôt réconfortant pour les acteurs du club à ce moment là et c’est surtout très encourageant de voir que cette mobilisation a soudé autour du projet des gens prêts à poursuivre l’aventure avec nous, passée la déception.

• Cela peut-il vous amener un public nouveau ?
Bien sûr ! Attention nous ne partons pas d’une feuille blanche puisque ça fait 4 ans qu’on joue progressivement de plus en plus de matchs à Mont-de-Marsan. On va en revanche pouvoir lancer une nouvelle étape de promotion et de fidélisation que la saturation de Laloubère ne nous permettait pas de construire en dehors des événements délocalisés.

• Vous ne serez sans doute pas les utilisateurs exclusifs de cette salle. Est-ce un problème ?
Nous ne le serons pas en effet. Mais là aussi nous ne partons pas d’une page blanche et nous travaillons depuis plusieurs mois à structurer les choses. Ce n’est pas un cas unique dans le giron français et rien n’est insurmontable sur ce plan.

• Financièrement on peut supposer que la nouvelle salle va vous couter plus cher mais aussi que cela peut vous rapporter plus en termes de billetterie, voire de sponsors avec de meilleures conditions d’accueil. Peux-tu nous donner quelques chiffres ?
Nous travaillons actuellement sur ce sujet pour établir un projet pluriannuel et un business plan. Tout ce que je peux dire c’est que jusque-là cette évolution est parfaitement comprise par nos partenaires et nos supporters qui suivent et que les travaux avec les collectivités avancent aussi positivement. L’objectif est toutefois en trois ans de pouvoir au minimum stabiliser le budget du club autour d’1,5 à 1,6M€ quand il oscille régulièrement entre 1,2M et 1,3ME depuis que nous jouons la Coupe d’Europe. La salle n’est pas la solution magique. C’est un outil de travail qu’il appartiendra au club de valoriser sportivement et économiquement, sans griller les étapes, comme on l’a toujours fait.

• Toutes les équipes sont-elles concernées par ce déménagement ou uniquement l’équipe professionnelle ?
Là aussi il faut travailler progressivement. A la rentrée la priorité sera l’accueil de l’équipe professionnelle. Le conseil d’administration souhaite ensuite faciliter les compétitions de championnat de France jeunes (Espoirs, U17, U15) sur l’agglomération montoise sous réserve d’une harmonisation des calendriers d’occupation des salles avec les clubs montois dans l’été. Le club restera investi dans l’association territoriale Basket Cap de Gascogne chargée de développer le basket avec 5 autres clubs du territoire de Saint-Sever auprès des plus jeunes. On ne coupe donc pas radicalement le cordon !

• Quel est d’après toi le plus grand risque dans ce déménagement définitif : que le public ne vous suive pas ou que le Basket Landes perde une partie de son âme ?
La vie est une aventure dangereuse Dominique !!! Le plus grand risque pour Basket Landes c’était de ne rien faire. Jusque là, je le répète, l’adhésion au projet des supporters, des bénévoles, des partenaires publics et privés se confirme. L’âme de Laloubère est une chose, l’âme de Basket Landes c’est aussi grandement les gens qui la composent et ceux-là déménagent aussi !

• Vous avez déjà joué à Mont-de-Marsan. Sur le plan sportif, qu’est-ce qui change le plus ? Y avez-vous déjà pris vos repères ?
Les sportives elles même répondraient mieux que moi ça à cette question. Il y a quelques temps, je pense qu’elles auraient regretté d’y manquer de repères mais je crois que progressivement les choses ont changé. Sportivement c’est aussi le théâtre de quelques uns de nos plus grands exploits ces dernières années : Moscou en Coupe d’Europe, les phases finale de Coupe d’Europe l’an passé, Bourges, les phases finales de Championnat. Nous ne partons pas d’une page blanche. Il faut par contre en tourner une. Ce n’est pas la fin de l’histoire, c’est un chapitre qui se ferme. Le suivant ne devrait pas manquer de saveur !

• Ce 1er avril, il y aura un match à jouer et à gagner contre Charleville. N’as-tu pas peur que l’émotion prenne le pas sur le sportif ?
Non parce que justement pour le coup l’enjeu sportif est clair. Battons Charleville et nous assurons notre quatrième place et notre seconde participation à des playoffs. D’ailleurs si nous ne qualifions pas pour les playoffs, nous reviendrons à Laloubère pour le Challenge Round. Ce serait quand même mieux d’honorer notre vieille salle d’un départ sur une qualification en demi-finale ! De l’émotion il y aura c’est certain mais je suis certaine que les Filles seront à la hauteur. Il n’y aura pas de changement du protocole d’avant match. Les célébrations viendront en fin de partie sur le parquet, dans l’esprit maison. Mais la fête serait gâchée si on perdait ! Bon évidemment, je mentirais quand même si je jurais que je ne crains pas d’avoir besoin d’un petit kleenex ou deux.

• Penses-tu que Laloubère va rejoindre samedi la salle d’Eyres-Moncube au Panthéon des salles mythiques du Sud-Ouest ?
Le Panthéon des salle mythiques du Sud-Ouest … Allez, oui !

Vous l'aurez compris, quelque soit la nostalgie qui ne manquera pas d'entourer cet évènement : ce premier avril n'est que le début d'une nouvelle aventure pour Basket Landes. Alors autant commencer par une victoire !

Mardi 31 Mars 2015
Dominique B.

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